jeudi 19 novembre 2009

Le jazz au Bangladesh

Jouer la marseillaise à l'école !
Voilà à quoi j'en suis réduit.
La foule est en délire...




lundi 16 novembre 2009

Brouhaha à Dhaka

Pour voir les photos en grand, cliquez sur le diaporama qui s'affiche sur la droite.


Voyage au Bangladesh.

Du 24 Octobre au 2 Novembre 2009

Jean-Marie et Vianneyte Roux
Avertissement avant de lire. Les personnages de ce récit, Jack et Irina sont les héros des aventures décrites par Maxime sur son blog « Bangladesh insiders ». En fait ce sont des pseudonymes de Maxime et Alice.


Nous avons découvert le repaire de Jack et Irina!

Au cœur de Dhaka, la capitale du Bangladesh, ils se sont créé un "chez eux" chaleureux et accueillant. Il y fait bon vivre et se reposer entre deux aventures, ou bien après des journées harassantes, ruisselantes, débordantes, bruyantes, grouillantes comme à Dhaka.

Cet endroit se trouve, vous le comprendrez aisément connaissant leur goût pour l'aventure, non loin de l'aéroport et dans un quartier agréable, Gulshan. Vous trouverez leur appartement au fond d’une ruelle étroite, perpendiculaire, à une des larges artères encombrées de la ville. Y circule incessamment un flot de véhicules frayant leur passage à coups de klaxon difficiles à supporter. Imaginez le bruit tout au long de la journée !

Ces avenues sont bordées de poteaux dont les fils électriques entremêlés tels des nœuds de fils de pêche que l'on a tous essayé de démêler un jour…. sont les reflets de la situation de l'électricité au Bangladesh. Un réseau où la perte en ligne est considérable et dont 40% de la consommation n'est pas payée. Régulièrement dans la journée, l’électricité saute et s’arrête pendant une heure.

Quand on arrive à Dhaka, les contrastes sautent aux yeux.
Le premier dans ce pays musulman, fut de rencontrer une longue file de pèlerins, en partance, pour leur terre sainte, et se suivant un à un, formant une longue procession blanche, toute blanche. Comme dans le reportage de Jack sur les petits chapeaux blancs, vous vous souvenez?

Puis nous avons été confrontés à l'administration bangla pour obtenir nos visas landing permit. Long. Très long. Avec tentative de corruption (le Bangladesh est le pays le plus corrompu au monde) : L’employé nous a reçus dans un tout petit bureau, avec des "asseyez-vous, je reviens"…"it will be quick and easy" le tout en anglais.
Troisième contraste : la langue. L'anglais utilisé dans l’administration, n'est cependant pas la langue parlée par les gens dans la rue. Ni au bureau entre Bangladais. Jack et Irina, se sont donc mis à apprendre la langue populaire. Ils la comprennent bien et la parlent assez pour se faire comprendre et respecter.
Il est grand temps que nous vous donnions des nouvelles de nos chers héros: A l'aéroport, Jack patientait. Irina nous a rejoints. Au-delà de l'émotion, les retrouvailles, furent empreintes d'un sentiment de fierté et de succès de nous retrouver ensemble sur cette terre si lointaine. Quel bonheur! Ils vont bien, ils sont très à l'aise dans ce pays, s'étant tout à fait adaptés à leur nouvel environnement. En un mot, ils sont chez eux. Irina nous avouera cependant être fatiguée, par la charge de travail, même si elle aime beaucoup son job, et par les trois heures de voiture par jour pour se rendre au bureau. Les déplacements en voiture sont éprouvants car la circulation est dantesque.
Quatrième contraste, le climat. Chaud et humide. Et donc une végétation luxuriante, abondante, verdoyante, arborescente : caoutchouc, bambous, palmiers, lauriers. Pourtant c'est une saison agréable ici: finies les pluies de la mousson, et la température étouffante liée à l'humidité maximum. 33°C est une température douce pour cette ville.

D'ailleurs, à l'heure où nous vous écrivons, nous sommes confortablement installés dans le salon, toutes fenêtres ouvertes, une bise nous rafraîchit, mais nous subissons le concert de klaxons dont tout le monde bénéficie. Si nous voulons nous en dispenser, il existe plusieurs solutions:

Un, demander à Jack de jouer de la clarinette, quel virtuose! Même si vous ne lui demandez pas d'ailleurs, car il en joue tous les jours, la passion toujours chevillée au corps.
Deux, actionner le ventilateur du plafond. Il est très efficace et indispensable pour supporter la chaleur.
Trois, mettre de la musique, émise par la chaîne dont les baffles mesurent un mètre cinquante de haut. Mais à coup sûr vous aurez du jazz !!!

Autre contraste, le niveau de vie. Et surtout la pauvreté, l'extrême pauvreté, voyante, hurlante, criante, débordante, qui concerne 50% de la population. Par pudeur, nous ne la décrirons pas. Mais nous exprimerons cette prière empruntée à un évêque africain:

Que ton règne vienne,

Dans la diversité des peuples et des cultures.

Un règne de justice, de pardon et de paix.

Ecoute la clameur des hommes au long des siècles

Et sur tous les continents.

Nous rêvons d'une terre

Sans mal, sans haine,

Ni violence, ni faim,

Sans racisme, sans exclusion, sans frontières.

Que ton règne vienne.

Ils se sont créé un "chez eux" chaleureux et accueillant.

Imaginez un intérieur simple et sobre. Murs blancs, tons chauds. Des meubles en bois foncé provenant pour la plupart des bateaux désossés qui atterrissent sur la plus grande plage du monde, à Cox’s Bazar au Bangladesh. Des tapis recouvrant partiellement le sol carrelé. Un salon sur deux niveaux tout en longueur se poursuivant par une terrasse donnant sur le lac poissonneux entouré de grands arbres et peuplé d'oiseaux. Sur le pont, le flot de grosses voitures, de cars, de rickshaw, peinant, suant, soufflant, de camionnettes, de camions, de motos, vélos, de baby taxis … et autres véhicules difficilement définissables, notamment à trois roues, continuent leur ballet assourdissant, bruyant, incessant. A côté des gens marchent… hommes portant longues jupes et femmes portant pantalons, saris et voiles aux couleurs chatoyantes, bleu turquoise, rose fuchsia, vert pomme. C'est très beau!

Que mangent-ils, nos héros, nous demanderez-vous? C'est peut-être là la raison de leur dynamisme et de leur énergie? Ils consomment sans modération et comme base de leur alimentation: noix de coco, lait de coco, chair de coco dure ou molle, ça dépend de l'espèce, et pamplemousse… mais pas les petits que l'on trouve en France, du thé et des soupes pimentées. Tout est pimenté !

Nous avons été plongés dans la culture bangladaise en arrivant à l'occasion du mariage du fils du directeur de l'usine d'Irina. C'était le troisième jour du mariage. Jour que l'on appellera le mariage public. Il se déroulait au palais des congrès de Dakha. Très grand bâtiment pour accueillir 8000 personnes ce soir-là et décoré par des milliers de fleurs multicolores. Les parents (les hommes) accueillaient les invités à la porte: premiers serrements de mains. Les mariés étaient "exposés" sur l'estrade de la salle de conférence et posaient pour des photos avec tout le monde et n'importe qui…comme nous. Tout de suite Jack et Irina ont été coachés par l'équipe d'Irina, ceux avec qui elle travaille tous les jours. Des hommes jeunes, très prévenants qui nous prennent en charge pour le dîner, au deuxième service d'une des trois salles de réception. Cela pourrait évoquer le repas biblique où tout le monde est invité à la table du maître. Même les étrangers ramassés aux croisés des chemins.

Nous avons pu découvrir les mœurs locales en matière de tenue à table et de menu. Pas très ragoûtant. Une nappe salle… pas étonnant, je vous parlais de deuxième service et j'ajouterai que les détritus sont posés directement sur la nappe et vous comprendrez! On mange… avec les doigts…couteaux, ils ne connaissent pas. Nous avons dégusté du poulet (un par personne … on était 8000!) très spicy, du bœuf, de l'agneau, des crevettes, avec du riz (bien sûr…heureusement il adoucit les épices!), de la purée de lentilles, le fameux Dal quotidien, et comme dessert des boules sucrées, et du yaourt cuisiné. La boisson étant du lait parfumé. C'était bon et très copieux, mais le décalage horaire et le dépaysement ne nous engageaient pas à trop manger.

Au cours de cette première journée de récupération de notre voyage, nous apprécions nous poser dans leur "chez eux" et découvrir leur quotidien.

Rénou brique l'intérieur, ménage, lessive, cuisine. Nous offre du jus d'orange délicieux. Est à nos petits soins tout en restant très discrète. Elle demeure désormais chez Jack et Irina.

Outre le bruit de la rue, nous sommes étonnés du bruit du ciel, les avions n'épargnant par les habitants du centre ville de leur vrombissement fracassant, il faut vous dire qu'une base aérienne militaire se trouve au milieu de Dakha et l'aéroport est tout proche.

Tout proche aussi, on peut y aller à pied par une charmante promenade le long du lac, le German Club. Au rendez-vous: piscine et tennis et bar pour rencontrer d'autres expatriés. N'imaginez pas le style hôtel de luxe aux vastes espaces et aux décors de rêve mais c'est un lieu néanmoins préservé par une haie d'arbres aux essences tropicales qui masque les hauts immeubles voisins qui plongent sur la piscine.

John, un des serveurs du German Club est devenu l’ami de Maxime et Alice. Là encore, on mesure tout l’intérêt pour eux d’apprendre la langue locale et de faire l’effort de s’intégrer au peuple bangladais par leur langue. C’est d’ailleurs le seul moyen de communiquer avec Rénou, avec les commerçants, les employés de bureau, le livreur de DHL… qui manifestent hautement leur reconnaissance… Donnobat, Donnobat, Donnobat. (Merci, merci, merci).

Déambuler dans les rues à pied (activité peu commune des « blancs ») nous permet de nous rendre au grand quartier commerçant proche de l’appartement de Jack et Irina. Nous marchons au bord de la rue dans la poussière risquant notre vie par le va et vient de véhicules roulant à gauche, se dépassant, s’évitant, klaxonnant. Nous croisons : trois hommes accroupis autour d’un appareil électronique mis à nu ; un vélo en panne en cours de réparation ; des enfants qui vendent des bonbons ; des mendiants handicapés ; des femmes et leur bébé qui font la manche ; des hommes accroupis qui se soulagent ; des vendeurs de fruits, de plats cuisinés… au pied du West Inn, hôtel de luxe ou de hauts magasins placardés de publicité à l’américaine ; d’échoppes minuscules qui vendent de tout ; avec toujours deux, trois, quatre, cinq personnes quand une seule suffirait. La densité de population est la plus forte au monde. Mille personnes de plus chaque jour dans la capitale qui passera dans six ou sept ans de quinze millions d'habitants à vingt, vingt-cinq millions. D'où un paysage dans lequel il y a toujours des constructions. L'étayage par les bambous étant très couleur locale.

Au bureau de Jack, notre visite paralyse tout le monde : salutations très cordiales, obligation d’accepter des mets offerts avec prévenance, et d’être l’objet de leur curiosité « dévisageante » car ils restent statiques devant nous à nous regarder.
Patrick, de l’ambassade, rencontré au German Club, nous dresse un portrait du Bangladesh qui complète ce que nous en disent I et J et ce que nous avons lu sur ce pays.

Vous imaginerez mieux par cette analyse ce que vivent nos chers expatriés.

95% des eaux de l’Himalaya arrosent le pays drainé par deux grands fleuves, le Gange et le Brahmapoutre. C’est le pays du delta, du delta du Bengale, berceau de la civilisation indienne. Outre ces grands fleuves, des milliers de rivières s’écoulent dont les lits peuvent se déplacer de 1 Km à la ronde et peuvent grossir au cours des crues provoquant des inondations tristement célèbres et dévastatrices. Un quart du pays est sous les eaux chaque année. Les habitants cultivant la terre se regroupent sur des îlots fortifiés pour résister à la force des eaux. Le delta est une région à haut risque dans laquelle, il ne faut pas s’aventurer. En dehors des ravages dus à l’eau, se trouvent les fameux tigres du Bengale, mangeur d’hommes… et ce n’est pas une légende.

140 millions d’habitants sur 140 000 km2 : des chiffres qui parlent tout seul de la densité dans ce pays.

Un peuple, fier de son pays. Un peuple gentil. Un peuple non marqué par le terrorisme même s'il est une menace potentielle présente. Aujourd’hui il n’y a pas de problème de sécurité le jour. Mais l’ambassade met toujours en garde cependant les résidents étrangers. Un peuple besogneux qui travaille. Ou à qui le travail ne fait pas peur.

Les dernières élections ont mis au pouvoir à 70% des voix, un gouvernement laïc modéré. Sur 345 sièges, 45 sont réservés aux femmes. Le premier ministre étant une femme. Les élections ont été contrôlées par des instances internationales après épuration de 12 millions de noms des listes électorales.

Le gouvernement s’efforce de moderniser le pays. L’industrie du textile est première… Jack et Irina en savent quelque chose. De nombreux bureaux d’achat existent : pour les vêtements et autres produits qui fournissent les magasins européens et asiatiques. La brique est l’élément de construction avec le bambou. Les briques sont fabriquées dans des usines qui marquent le paysage de leur empreinte fortement polluante même si une grande partie de la production est de main d’hommes. Le bambou est transporté en … vélo. Même si les troncs mesurent 10m de long.

Des ONG et des associations portent assistance à la population. En plein cœur de Dhaka, un orphelinat tenu par des français, ramasse les enfants dans la rue, les éduque et leur donne un métier. Les missionnaires de la charité sont aussi présentes notamment dans l’éducation des enfants. Nous visiterons leur centre et achèterons quelques articles fabriqués par des handicapés.
Au cœur de leur activité. Mercredi 28 Octobre. Ou comment diriger une affaire de textile au Bangladesh ?
Le textile, première activité économique du pays, en plein essor industriel, peu touché par la crise économique actuelle. Une main d’œuvre nombreuse, jeune, pas chère, besogneuse, qui ne demande qu’à travailler … mais attention à la corruption et au vol.

Le bureau de Maxime, alias Jack, se trouve non loin de chez lui. Ils domptent ses vendeurs d’une main de fer par un contrôle strict mis en place pour gérer le stock, la production et la vente des entoilages pour col de chemises. Maxime a su entrer dans la peau d’un senior manager pour se faire respecter et mettre un peu beaucoup d’ordre dans cette affaire. Il nous emmène dans son usine à l’ouest de Dhaka où nous découvrons une fabrique de tissu, autonome, grâce à ses deux générateurs, et assez moderne par ses trois machines qui enduisent de colle les rouleaux de tissu après les avoir dépoussiérer. La chaleur est suffocante. Les rouleaux de tissu sont alors emballés (une centaine de nuances étant proposée à la clientèle) puis livrés ou stockés.

Alice se rend tous les jours en voiture avec son chauffeur (car il est impossible pour un européen de conduire dans ce pays) à une heure trente éprouvante de chez elle. Son bureau est sur le site de l’usine qui fabrique ses produits. Très vaste usine qui produit des étiquettes pour vêtements. Les ouvriers et ouvrières fourmillent et travaillent soit sur des machines de haute précision soit à la main, assis par terre, à la bangla. Les ateliers de femmes qui collent les paillettes ou qui peignent les minuscules moules qui imprimeront les signes des grandes marques comme Promod ou Joyful, sont impressionnants : les femmes sont serrées les unes à côté des autres face à face, toutes voilées, voiles de toutes les couleurs vives qui existent qu’elles réajustent à notre entrée.

Usine qui sort aussi tout ce qui est nécessaire autour des étiquettes : les sachets, les sacs plastique, les cartons d’emballage, les cordelettes, les cintres … du monde partout et des machines partout. Un fort contraste entre haute technologie et travail à la bangla.

Alice est partie de rien et cette affaire a maintenant belle allure, mais à quel prix ? Fatigue intense, temps passé considérable : longues journées, longues semaines, pas de week end, solitude pour tout porter, intégration difficile en tant que femme ayant des responsabilités. Aujourd’hui son équipe est efficace, formée, mais sa présence reste indispensable.

La couverture professionnelle de nos deux héros ne leur laissent que peu de place pour leur activité romanesque à la découverte de paradis étrangers vers d’autres pays mais des coupures sont néanmoins nécessaires pour eux, pour leur santé et pour leur moral. D’où leurs escapades vers la Malaisie, le Laos, la Thaïlande et la suite … pour bientôt. Ils ont des projets !
Old Dhaka avec leur allié dans la place. Jeudi 29 Octobre 2009. Ou comment visiter le cœur du Bangladesh sans se perdre?
Il s’appelle John, il est bangla et par amitié pour Maxime, il propose de nous servir de guide pour visiter le vieux Dahka. Bien sûr des lieux touristiques : un musée (ancien palais impérial), l’église arménienne où nous rencontrons le prêtre installé au Bangladesh depuis 25 ans, la star mosquée et un ancien fort, transformé en vaste jardin public très fleuri et arboré où les habitants du quartier et surtout les amoureux aiment se promener et se détendre pour fuir quelques temps le vacarme et le grouillement du centre… mais aussi des lieux plus insolites : le chantier naval au bord du Buriganga qui nous vaut un tour en pirogue. Nous découvrons l’intense activité fluviale. Et un petit resto où nous dégustons une soupe vers 15 heures tandis qu’autour de nous hommes et femmes consomment leur assiette de riz et de poulet, mangeant avec la main droite et terminant en mâchouillant des graines parfumées. Grâce à John nous emprunterons le baby taxi et le rickshaw, expérience indispensable quand on se déplace au Bangladesh mais oh combien éprouvante pour les conducteurs comme pour les passagers. Surtout quand notre baby taxi s’est retrouvé coincé entre 2 gros bus pleins à craquer dont les occupants ont commencé à nous chercher des noises.
Dîner bangla chez un bangla. Ou comment un simple bangla qui n’est jamais sorti de chez lui, peut-il avoir une si grande ouverture à l’étranger ?
Les faits : Après nous avoir fait vivre à l’heure bangla découvrant la vie des habitants du vieux quartier de Dhaka, John nous reçoit à dîner chez lui.

Chez lui? Pour y arriver, nous prenons le rickshaw, traversons le luxueux quartier des ambassades jusqu’à une porte de séparation qui nous permet de franchir la frontière avec le quartier populaire où vit John. D’ailleurs il nous attend là pour nous guider jusqu’à chez lui car il aurait été impossible de trouver notre but dans ce dédale de ruelles en terre battue encombrées, poussiéreuses et défoncées.

Au quatrième étage d’un immeuble en dur nous faisons la connaissance de ceux qui habitent chez lui et qui vivent par lui sur son salaire de serveur au German Club, Donc nous rencontrons sa femme Juliana, sa fille Helen, qui crie devant nos allures si étranges d’européens, sa mère, souffrante, son neveu et son jeune frère. Ils vivent dans un deux pièces : une entrée/salon/salle à manger, 2 chambres, une petite cuisine. L’ensemble est petit, peu meublé, pas très propre, mais nous sommes accueillis avec beaucoup de sourires et d’amabilités. Commence alors la valse des plats nombreux et copieux qui nous est réservée à nous quatre, invités, assis autour de la table, nos hôtes nous servant. Ils n’accepteront qu’un verre de vin apporté par nos soins, debout, autour de la table. Au milieu du dîner arrive le père de Juliana, très agréable de conversation… en anglais. L’anglais bangla pas toujours facile à comprendre !

Sitôt dîner, sitôt partis, nous regagnons le logis à pied le long du lac.

La campagne au nord ouest de Dakha. Ou comment sortir des artères encombrées bordées d’échoppes minuscules?
Pour retrouver Jack après la visite de l'usine d'Alice, nous emprunterons une route de campagne à la découverte de nouveaux paysages.

La route étroite et défoncée rend tout croisement problématique surtout quand nous rencontrons (fréquemment) ces fameux petits camions peints aux formes généreuses. La vue est dégagée entre deux villages par la perspective des champs cultivés en contre bas de la route. En ce moment nous sommes à la période entre deux eaux, les inondations sont derrière nous mais les eaux ne sont pas encore à leur plus bas niveau. Dès que de la terre se découvre, les paysans sèment du riz. Il y a donc des champs de riz à tout niveau de développement. S'arrêter pour cueillir du riz fut une première. Les tout petits grains poussent en épi sur des pieds herbeux très légers d'une ravissante couleur vert tendre. D'autres légumes sont cultivés sur des petits lopins de terre. Et nous longeons aussi des champs de briques!!! Et oui, de briques qui sèchent bien ordonnées et rangées en parcelles rectangulaires avant d'être cuites dans les fours qui transforment le paysage naturel par la présence innombrable de hautes cheminées qui fument à certaines époques. La briqueterie est un chantier à ciel ouvert. Outre les champs de briques, nous voyons les tas de briques cuites, et de gravier sur lesquels les ouvriers et ouvrières travaillent, assis sous leur parapluie pour certains, afin de se protéger du soleil. A la saison des pluies, les briqueteries sont inondées. Plus de travail!

L'habitat rural est fait de cases en dur ou en tôle ou autre matériau assez rudimentaire dissimulé par la végétation. La pauvreté se définit aussi par la précarité des logements.

La route traverse des villages où nous retrouvons le grouillement typique: les marchands, les véhicules en tout genre, les enfants à peine vêtus, les bricoleurs et travailleurs qui font fonctionner l'économie locale.

Au bout d'une heure et demie de cette route campagnarde, nous retrouvons Jack dans un resto italien de bord de route vers 15 heures après avoir passé beaucoup de temps en voiture depuis notre départ de Dhaka mais à une allure si lente que l'on bénéficie vraiment de l'ambiance environnante.

Une journée à Savar. Ou comment rencontrer des bienfaiteurs qui œuvrent pour le développement du pays ?
Si certains bangladais émigrent, en France notamment ou au Canada, (nous avons rencontré Robin et sa famille à Massy Palaiseau puis à Dhaka en voyage), ceux qui restent sont souvent victimes du déchainement des éléments naturels, les inondations, les cyclones, les pluies, les raz de marée, l'élévation du niveau de la mer, les fameux tigres du Bengale, la famine, la sécheresse, et la pollution, le manque d'hygiène …

Certains se lèvent pour apporter une pierre à la construction de la dignité humaine. Nous parlerons de l'association Friendship et plus particulièrement de l'action d'Yves Marre, français installé au Bangladesh, de sa femme bangladaise, et de Corentin, jeune Vannetais, parti donner un an de son temps et de ses talents et compétences d'ingénieur Icam pour ce chantier naval. Car oui, cela peut vous surprendre, c'est par une activité de construction de bateau qu'ils viennent en aide à la population appauvrie. Comment? En ayant construit deux catamarans hôpitaux qui se déplacent sur les rives des fleuves avec une équipe de médecins et un bloc opératoire.

En redécouvrant la culture bangladaise par la reconstruction de bateaux avec les techniques anciennes. Bateaux remis en activité ou maquettes de bateaux exposées dans les musées locaux ou internationaux.

En construisant de nouvelles embarcations plus légères avec des matériaux plus modernes pour former des charpentiers de marine à de nouvelles techniques et pour produire des bateaux plus adaptés aux besoins d'aujourd'hui.

Vous pouvez en apprendre plus en vous rendant sur internet sur leur site.

Ce chantier est installé au bord d'une rivière à une heure de route de Dhaka. C'est un havre de calme, de douceur, de verdure. La vue est magnifique. Le trafic fluvial est intense. Toute embarcation est différente par sa taille et sa fonction. Nous aurons la chance de naviguer quelques heures sur le fleuve et sur une rivière, ce qui nous permet de pénétrer encore plus profond dans ce pays qui nous livre quelques secrets. C'est un moment inoubliable pour nous quatre. Le temps fort de notre séjour. Nous découvrons la vie au bord de l'eau et dans l'eau.

Scènes typiques comme les vaches menées au bain pour leur toilette; femmes voilées et toutes habillées avec les enfants et les hommes se lavant et se rafraichissant car il fait vraiment très chaud; transport de personnes et de denrées; culture du riz et travaux des champs; pêche; quelle ambiance!

Notre pirogue, à moteur, à voile, à rame, échoue souvent car les eaux se retirent peu à peu laissant des bancs de vase qui nous surprennent. Hop, Maxime à l'eau et ça repart. Malheureusement, les noyades sont une des causes fréquentes de mortalité infantile.

Les méfaits du climat. Ou comment s'adapter en tant qu'Européens?
Jack et Irina ont réussi à s'adapter à ces conditions difficiles de vie sous ces latitudes. Pour nous, huit jours n'auront pas suffi. Nous avons quelque peu souffert de la chaleur, des moustiques et de la cuisine locale. Certaines maladies provoquées par les moustiques peuvent se révéler dangereuses. Or ils piquent sans se faire voir ceux-là tant ils sont petits!
Conclusion.

Un pays en plein essor apparemment non contrôlé. Que vont devenir ces milliers d'ouvriers aux conditions de travail parfois précaires et à l'engagement pas toujours fiable.
Des enfants courageux, conscients de leur chance de vivre cette expérience professionnelle et humaine. Et l'après Bangladesh? Ils y réfléchissent.

Un voyage enthousiasmant à l'autre bout du monde. Nous ne sommes pas les mêmes avant et après avoir découvert le Bangladesh. Nous avons un autre regard sur l'humanité. Cela amène à reconsidérer notre place dans ce monde et à vivre avec chaque personne humblement et sans jugement mais avec une conscience plus aigue de notre prochain à la fois si différent et si accessible.
Nous avons voulu vous donner par ce récit des nouvelles d'Alice et Maxime d'abord. Mais aussi vous rapporter notre modeste point de vue sur ce pays dans un souci d'être un petit peu des passeurs d'espoir.

jeudi 27 août 2009

Carnage Au village



De retour à la vilaine, Jack et Irina se remirent au labeur sans prendre le temps de souffler. L'escapade à Savar désormais derrière eux, ils revinrent à la dure réalité de l'univers du textile et se remirent à faire des K€ à la seule force de leur pensée.

Ils se glissèrent à nouveau avec l'habileté qu'on leur connaît dans leurs costumes de capitaines d'industrie. L'œil le plus inquisiteur n'aurait pu se douter que sous ces hardes se cachait en fait le couple le plus téméraire du frip, du froup, mets tes doigts dans ton nez.

Car pendant que l'Europe s'adonnait aux plaisirs lascifs de l'oisiveté, les peuplades Asiatiques, fourmis besogneuses, s'échinaient infatigablement. La jungle vociférante de Dhaka bruissait du continuel vacarme des klaxons et des pots d'échappement et la Bangladècherie construisait sans relâche son redoutable et branlant édifice.

Bref, ce que l'on appelle le développement suivait son chemin, tortueux et inhumain.

Tous les matins, à 7h30, Irina, levée la première,secouait Jack des limbes. Un frugal petit déjeuner avalé elle montait prestement dans sa Toyota spacio afin de se faire conduire à Konabari et d'y gérer son rififi. Un dénommé Biplob s'acquittait de cette tâche avec grand professionnalisme.

Walkirie inépuisable de l'étiquette, elle passait alors la journée sur le champ de bataille. Harcelant sans relâche ses fournisseurs, se mettant en quatre pour ses clients, tenant la comptabilité d'une main de fer, terreur intraitable de la feigne et de la négligence, un œil sur ses états de stock, l'autre sur la qualité des livraisons, elle déployait avec une ardeur chaque jour renouvelée sa rigueur, son sens de l'organisation, son soucis du détail et du travail bien fait. Ses fidèles écuyers, le noble Shamim, Monik le sournois, Roshan le nonchalant et Mamun « n'à qu'une dent » lui étant totalement dévoués, elle se voyait obéir avec un respect mêlé de crainte.

Jack, quant à lui, se penaillait pendant quelques minutes sur la terrasse. Une toilette sommaire lui laissait le temps d'identifier la subtile différence entre la sixte mineure, le triton et l'accord contre-diminué, cela grâce à l'acquisition récente d'un logiciel du dernier cri. Après quelques gammes et poses de son, il sautait dans sa Toyota Yaris et partait pour les bureaux de Banani conduit par le fringant Nohman. Premier arrivé, il s'installait alors derrière son bureau et abattait avec une rigueur infaillible les diverses tâches qui lui incombaient, et lui décombaient.

Lorsque midi sonnait, néanmoins, Jack avait l'habitude de se rendre au German club. Cela lui permettait de se desporter et de se nourrir dignement. Il avait l'habitude, en attendant la soupe, d'essayer son Bangla sur les serveurs du club. Ceux-ci, désormais habitués à ses visites, et reconnaissants de l'investissement linguistique qu'il produisait, lui réservaient un traitement de faveur des plus généreux.
comme l'oiseau qui petit à petit, fait son nid, une certaine amitié se noua entre eux. John, Bangladeshi de confession catholique, semblait notamment apprécier ces conversations.

Un beau jour ou peut être une nuit, alors que Jack lui avait rendu service en signant au club deux de ses amis, il lui proposa de les emmener Irina et lui en son village.

Un week end de trois jours étant prévu pour la mi-août, et certain que l'idée plairait à Irina, Jack finit par accepter.
On se mit donc d'accord. On partirait au lever du soleil avec la voiture d'Irina. Pour allier l'utile à l'agréable, un ami de John, désirant rentrer au village, se chargerait de la diligence. On visiterait quelques monuments dignes d'intérêt, on dormirait à l'auberge et l'on rentrerait le lendemain.

Le jour convenu, Irina et Jack, frais et dispos, levés aux aurores, attendaient. Les sacs étaient bouclés, la voiture chargée... Mais toujours point de John. Maîtrisant une irritation croissante, Jack multipliait des appels téléphoniques se heurtant sempiternellement au standard vocal, ce qui signifiait que son interlocuteur dormait comme une merde.

Irina et Jack en profitèrent pour s'essayer au dur exercice de la patience.

Une heure après l'horaire convenu, John se manifesta enfin. Ce n'est qu'une demi-heure après qu'il rejoignit nos amis, accompagné du cocher, répondant au doux prénom d'Aminul. Celui-ci, s'installant au volant, fit tant crisser les pneus du véhicule qu'il froissa la douce Irina, toute retournée à l'idée des milles et uns accidents susceptibles d'abimer son outil de travail, et douteuse des réelles capacités du nouveau venu. La manœuvre de sortie aboutie, voyant que le désespoir gagnait la partie, Jack persuada Irina d'honorer l'ami de John de sa confiance et l'on quitta la ville.

Chemin faisant, ponctué par les frémissements et injonctions d'Irina à l'adresse d'Aminul, John put clarifier la raison de son retard. Comme sa petite fille, qui faisait ses dents, avait dormit en bas, car la moustiquaire du haut était défaite, étant donné la visite de sa tante la semaine dernière, qui avait laissé son pull en bas y ayant mangé une pomme, et du fait qu'il avait dû changer sa carte sim de terminal pour retrouver le numéro de son arrière cousin, il s'était, fourbu, octroyé une panne d'oreiller.

Perplexes, Jack et Irina opinèrent du chef. Quoi qu'il en soit, ils en avaient vu d'autre, et John n'avait pas commencé ses boniments qu'ils avaient déjà mis leur rancune à gauche.

Au bord de la route défilèrent d'interminables rizières, et autres champs, dont le charme indiscutable n'apprit rien de nouveau à nos héros.



Arrivée à Khalikapur

Après quatre heures de route, on arriva enfin à Khalikapur. On commença par boire un thé. La présence d'étrangers fit son effet, et Jack et Irina purent pressentir le rôle de montres à gousset qu'ils allaient devoir tenir pendant le week end.

John

John indiqua à ses invités la résidence destinée à les accueillir. Celle-ci, réservée aux visites de politiciens, était en émoi étant donné la visite de certains d'entre eux, qui saluèrent nos héros avec déférence.

On rejoignit ensuite la demeure de l'oncle, où l'on attendait depuis le matin. Jack et Irina découvrirent une vaste bâtisse ressemblant étrangement à une chapelle. Après un rapide tour du propriétaire, incluant potager et jardin, on déjeuna, après quoi, l'équipe prit congé et repartit en direction du tea shop, point de départ pour RasBari, la demeure du roi.

Hélas, il fallait attendre l'arrivée de toute une troupe, désireuse de profiter de l'occasion. On s'assit en cercle, on commanda des thés et l'on attendit, échangeant distraitement diverses banalités plus où moins poussées, se dévisageant mutuellement sans en avoir l'air, comme c'est de coutume dans cet étrange pays. Au bout de trois quarts d'heure de ce régime, comprenant à demi à quelle sauce ils allaient être mangés, Jack et Irina s'enquirent de la situation.

L'attente au Tea shop

Tout le monde était là, mais manquait Parvel. En effet, il allait venir à moto, mais comme celle qu'il avait avant n'était pas en état, il était reparti chercher l'autre. Or il n'avait pas les clés, puisque son cousin les avait prises. Ce que l'on ne savait pas encore, c'est que le cousin était à la mosquée, où Parvel attendait. John ayant son portable déchargé, et Parvel apparemment ignorant de la constitution du reste de l'équipe ne donnait pas de nouvelle et il fallut changer la carte sim pour l'appeler. Comme le cousin n'en finissait pas de prier, on proposa à Parvel de l'emmener en voiture, chose à laquelle il avait déjà pensé, mais n'avait point osé formuler. L'affaire était réglée, Parvel arriva en cinq minutes et l'on se mit en route, précédant un cortège de quelques motos.

Après une demi douzaine d'interruptions dues aux divers imprévus logistiques d'un voyage à plusieurs véhicules dans les conditions que l'on connaît, la maison du roi se révéla enfin.

On sortit de voiture et esquissa quelques pas dans le parc lorsqu'une averse violente se déclara et confina la promenade à un temple nauséabond dédié à des divinités phalliques Hindoues.



Jack s'écarta discrètement du groupe pour sécher les larmes d'Irina. Il faut croire que les dieux de la fesse les trouvèrent à leur goût puisque la pluie cessa.

On fit alors le tour du parc pour s'apercevoir qu'il y avait effectivement des monuments dignes de ce nom au Bangladesh, mais que c'était bien dommage que personne ne s'en occupe car ils tombaient en ruine.



En s'enfonçant dans un mausolée lugubre, Jack bondit soudain en apercevant un hibou perfide qui les observait d'un œil malveillant. Il avait vu juste car ce suppôt des ténèbres guettait l'arrivée de sang frais pour ses funestes maîtres : deux affreuses chauve-souris qui s'abattirent sur le groupe avec des hurlements terrifiants.



N'écoutant que son courage, Jack proposa à Irina de réaliser des clichés sur le vif, pour la postérité.



La balade terminée, et le groupe réuni, on repartit. Après une nouvelle demi-douzaine d'attentes réciproques et les coups de fil qui vont avec, on arriva à PurluS, où une promenade déhanchée emmena la troupe sur une route des plus bucoliques.







La foule en délire suivait Jack et Irina qui furent l'espace d'un après midi projetés dans la peau de stars du cinéma.







En rentrant, après quelques passages obligés chez le confiseur et les différents dignitaires du coin où il s'agissait de se gaver en faisant bonne figure, on rentra prendre l'apéro chez John.

Jack et Irina furent accueillis par une équipe de musiciens débridés qui leur proposèrent un pot-pourri local étourdissant. L'un d'entre eux ayant un instrument ressemblant de loin à une clarinette, Jack lui mit sa fessée lors d'un duel épique digne des fameuses nuits de Kansas city. Pendant ce temps, Irina, entraînée par la gente féminine, se laissait questionner sur la profondeur de son amour envers Jack. Il lui fut également offert un relookage facial d'un effet saisissant.

Ces dames nous préparent la pitance que nous allons devoir ingurgiter

Après une nuit assez inconfortable, une promenade à la mission catholique et trois visites de courtoisie à caractère gastronomique de type obligatoire et espacées d'une demi-heure seulement! Jack et Irina s'arrachèrent enfin à ce havre de paix et rentrèrent à Dhaka. La tête chargée de souvenirs et heureux d'avoir fait la visite, ils se jurèrent néanmoins qu'on ne les y reprendrait plus.


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lundi 27 juillet 2009

Cauchemard à Savar

La saison des pluies était maintenant bien entamée. En fait, il n'avait pas beaucoup plu pour l'instant, mais la moiteur insupportable de l'air infligeait à Jack et Irina des suées auxquelles ils n'étaient plus habitués. Ces chaleurs étouffantes, combattues dans les bureaux à coups de climatisation, étaient la cause de pannes électriques fréquentes.
Maintes fois, Jack se retrouvait ruisselant devant ses tableaux croisés dynamiques.
Le soir venu, la pratique du flutiau était devenu un véritable calvaire, et Irina elle-même faisait ces temps-ci grise mine en découvrant le soir l'homme qu'elle aimait couvert de sueur.

D'autre part, au retour d'une brève mission de reporting au QG français de Marcq, nos deux héros s'étaient replongés dans une routine qui commençait à leur peser.

Ils avaient rencontré, peu de temps auparavant une jeune garçon nommé Trévor leur ayant fait forte impression.
Ce jeune ingénieur encore bercé d'illusions s'était vu proposer un contrat de type "vient bosser là que j'te paye pas" par un espèce d'hurluberlu qui était tombé amoureux du Bangladesh (c'est dire !) où il avait eu la riche idée d'y emmener des péniches pour faire des hopitaux.
Non content de se livrer à des activités inimaginables à but non-lucratif (comprenez bien qu'il avait rapporté les péniches en personne, de France et par voie de mer), cet énergumène souhaitait désormais vendre aux pêcheurs Bangladais (comprenons-nous bien, ces gens n'ont pas le moindre argent) des bateaux en fibre de verre afin de remplacer une flotte exclusivement construite en bois.

Rassurez-vous, si je parle autant d'argent, ce n'est qu'une déformation professionnelle.

Bref, Trévor, fleuron du système d'enseignement Français était venu dans un pays voué à disparaître sous les eaux, dispenser ses connaissances à une bande de charpentiers analphabètes. (D'un autre côté, vu de ce côté là, c'est pas si bête).

Le voilà donc le nez au vent et l'estomac dans les talons qui débarque un soir à Dhaka. Nos héros, mus par une générosité fraternelle sans limites, accueillirent le drôle dans leur cache, après l'avoir copieusement arrosé lors d'un dîner d'infiltration au club Teuton.

De fil en aiguille, il leur fit part de ses conditions de vie.

Pour être plus prêt du chantier, il avait renoncé aux conditions de rêve qu'offre Dhaka pour aller dans sa banlieue, Savar, vivre sur un rafiot pourrissant le long des berges d'un fleuve au nom alambiqué. Là, tel un ermite, il s'était aménagé une paillasse, un réchaud connecté à un câble venant de nulle part, et un garde-manger. Ce dernier élément devant résister à la fois aux rats, au blattes, aux fourmis et au pourrissement, il dut déployer un trésor d'ingéniosité, qui aboutit finalement à la procuration d'une boîte en fer blanc. Il surprit également Irina en lui dévoilant une écorce de noix de coco percée lui permettant de se laver les mains.

Car vous l'avez compris, nos héros, fatigué des klaxons de "la vilaine", avaient décidé un beau matin d'aller passer leur congé à la campagne, et c'est chez leur nouvel ami qu'ils se rendirent.

Négligeant la facilité des voitures de fonction, par ailleurs réservées à leur activité professionnelle, Jack et Irina prirent le bus. Le voyage d'une heure et demie fut long et humide, mais pour une fois, il n'y avait pas de sale gosse qui chiale à s'en péter les cordes vocales.
Non, au lieu de ça, des usagers Bangladechois ahuris par la présence d'étrangers épiaient nos héros sans en avoir l'air.

Ayant eu la maladresse d'engager la conversation avec l'un d'entre eux, Jack fut acculé à donner un faux numéro à un quidam qui croyait en lui parlant avoir rencontré la fortune ; l'extrême pauvreté poussant la gent à vous appeler sans arrêt pour ne rien vous dire, chacun cherchant en vain une opportunité professionnelle qui pourrait le tirer de son bourbier, et percevant chez Jack et Irina l'irradiation grisante de la lointaine nébuleuse des pays riches.

Quand Jack et Irina arrivèrent sur place, il pleuvait. Trévor accouru à leur rencontre et les mena par des chemins inondés jusqu'au chantier naval. De là, il prirent une barque et se rendirent de l'autre côté de la rivière.



Après un repas sommaire, Trévor et Jack, adeptes de sensations fortes, se livrèrent à un concours de sauts pour le moins périlleux.




Puis un tour de reconnaissance sur le fleuve leur permis de réaliser à quel point la présence de Trévor intriguait les indigènes. Ceux-ci, feignant la promenade anodine, fouinaient en réalité autour du bateau en quête de commérages sur la vie de ce curieux individu.



L'après-midi aurait pu être totalement ressourçant si nos amis n'avaient été confrontés au dénigrement total de la profession d'ingénieur du son.

Le vendredi étant chômé, c'est jour de fête. Sur le fleuve, on organise des virées en bateau mouche.

Ainsi, toutes les demi-heures passaient des bateaux de plaisance exclusivement chargés de spécimens masculins surexcités se livrant à des danses exutoires dignes des plus grands clubs Parisiens. Le spectacle eut été cocasse si les bateaux, surgissant d'un bras de la rivière ne poussaient le son jusqu'à rendre la musique tout à fait inaudible, faisant fi d'effets larsen et de saturation propres à rendre unijambiste un manchot.

A l'issu d'une après midi changeant somme toute de la monotonie du quartier expatrié, nos amis laissèrent Trévor à ses blattes et retrouvèrent leurs pénates après s'être tapé la route en sens inverse.

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mardi 2 juin 2009

Ah là là !

Salut bande de moules !

ça faisait longtemps?
Comment ça va là bas?

Ici ça va.

Bon.

Allez, je vais publier une conversation des plus intéressantes que j'ai eue avec un oncle, qui va vous permettre de méditer et peut-être même de vous convertir.

A bientôt.

Mon cher oncle,

Comment vas-tu?
J'espère que les frasques de l'économie ne t'empêchent pas de voir se profiler, du haut des tours de la défense, un monde avançant vers la tolérance, le respect, l'amour ; et la sérénité et le partage en ce qui concerne les ressources énergétiques qui permettront à l'humanité de s'élever vers le progrès.

Je pense à toi, ainsi car j'ai discuté hier avec un type que tu connais, qui travaillait ici à l'exploration de gaz naturel. Malheureusement, il n'a rien trouvé et part bientôt.
Dommage pour le Bangladesh, pauvre nation dont le développement frénétique ne fait qu'accélérer l'émergence de problèmes que l'âme la plus naïvement positive ne peut imaginer qu'inéluctables et dévastateurs.

"Comment!", te vois-je penser, "mon neveu fléchit déjà? Il bascule du côté détestable de la désespérance?".

Marc, je ne sais que te répondre, sinon que ce pays étrange, cette jungle étouffante dont la gestion désastreuse des chefs de tribus favorise la dévastation au profit d'une industrie honteusement exploitée qui profite machiavéliquement du magnétisme des marchés, du système auquel nos pays contribuent aveuglement, m'égare parfois.

Je me rappelle l'objectif d'humanisation de la globalisation que tu t'es fixé, et espère que les perspectives sont meilleures vues d'ailleurs.

Nous allons bien avec Alice.
Nos hautes fonctions managériales respectives nous imposent rigueur et discipline.
Chronophages, elles laissent à Alice qui passe 3 heures par jour sur la route peu de temps pour la gaudriole.
Etant plus favorisé quant à la distance des bureaux, je m'en accomode assez bien.
Fatigué du riz et de l'impotence des indigènes, je me rend tous les midi au german club afin de manger des frites et d'y nager.

L'absence totale d'attraits de la culture musulmano-indienne de cette région du Bangale ne nous empêche pas d'étudier avec sérieux l'idiôme local, et Kafka, Hemmingway ou Dumas se chargent de nos courtes évasions.

Je t'embrasse en sachant que tu sais apprécier l'ironie provocatrice de mon propos et t'assure du bonheur de notre foyer.

Réponse dans les commentaires.

samedi 31 janvier 2009

Grand colloque intercommunal du petit chapeau blanc.

Enchantés par la visite de l'honorable Coralie ; collègue Franco (de souche) Hong-Kongaise (de par le fait) du haut commandement ; nous avons décidé ce week end de sortir de notre train-train de jeunes cadres surmenés avides de farniente casanière, dans le but de faire découvrir notre beau pays d'accueil à notre invitée.

Un repérage habile nous a permis, lors de la semaine de travail qui précédait, d'observer de curieux rassemblement d'hommes coiffés de petits chapeaux blancs très curieux. Nous nous aperçûmes qu'ils se rendaient tous dans un champ, non loin d'Uttara, qui n'est elle-même pas loin de Dhaka.

Curieux déplacement d'hommes coiffés de chapeaux blancs.

Après une rapide collation au "brunch" du Radisson (l'hôtel le plus chic de la ville), nous partîmes en Taxi vers le lieu du crime. Alors que nous filions bon train depuis une bonne paire de minutes, accoudés à la fenêtre, le visage au soleil, les cheveux aux vents et la lippe pendante, nous fûmes soudain pris au piège par l'infâme pieuvre qui condamne Dhaka à une vie exaspérante : le trafic. Mais, c'était sans compter notre bonne volonté : désireux d'arriver à temps au rendez-vous, nous abandonnâmes notre chauffeur et décidâmes de continuer à pied.

Satanés bouchons !


Il règne au Bangladesh un air de dimanche, le vendredi, et c'est avec plaisir que nous nous frayâmes un chemin dans une foule de plus en plus compacte, assez interloquée par notre présence.

Les gens s'arrêtent pour nous dévisager

Arrivés à l'embranchement qui va d'Uttara à Savar, le trafic était devenu complètement délirant ; regardez les photos et constatez avec effroi la pertinence du superlatif.
Nous nous faufilâmes néanmoins vers le côté de la route et avançâmes parmi la foule, au mépris de la poussière, des odeurs viriles et de l'encombrement.

Enclin à la discrétion, j'avais moi-même fait l'acquisition d'un petit chapeau, pas blanc, mais marron, afin de signifier mon soutien au mouvement, et suggéré aux femmes dont j'avais la charge de faire preuve de pudeur, et de masquer la blancheur de leur teint laiteux sous un voile prudemment prévu avant la promenade.

J'en profitais pour leur montrer une petite passe de hip hop dont j'avais le secret

Pour ou contre le port de la burqa?


Nous nous promenâmes alors le long du chemin, et ouvrîmes nos sens pour apprécier l'authenticité du Bangladesh : le son des hauts-parleurs installés le long de la route débitant des musulmaneries, les stands bariolés de brosses à dents, de caches-nez, de courges, d'épices, de mendiants atrocement mutilés, les yeux curieux des badauds, enchantés d'essayer leur Anglais sur deux brunes aux yeux verts, le spectacle du fleuve, les barbes des barbus...



En effet, malgré nos précautions de mimétisme, la manœuvre de discrétion avait lamentablement capoté, et les petits chapeaux blancs nous dévisageaient comme des bêtes de foire dés que nous arrêtions d'avancer.

C'est pas faute de pas avoir essayé !

Après moultes photos, palabres, regards amusés, nous finîmes par faire demi tour pour rejoindre la route principale et rentrer au bercail.

Sur le chemin du retour, nous fûmes ravis d'être témoins d'un sport très populaire très justement nommé le bus à dix.

La règle est très simple, on se rassemble le long de la route et des bus passent à moyenne vitesse. Là, il s'agit de monter par groupe de dix dans le bus. La première dizaine gagne des places assises, la deuxième, des places sur le toit, et la troisième, mains coupées, membres arrachés ou broyés (selon disponibilité).



Un sport qui se pratique dans une bonne humeur conviviale, emprunte d'une franche camaraderie dégageant une chaleur tout à fait sympathique.

A la prochaine !

PS : A la demande générale, je lève le voile sur le fin fond de l'histoire. Il s'agit en fait d'un pèlerinage musulman annuel à rayonnement international, nommé Ijthema.

samedi 10 janvier 2009

Passage à tabac à Dhaka

3h30 du mat'. Je n'arrive pas à dormir. C'est le jet lag. Je délaisse mon plumard pour aller faire un peu de vaisselle.
La fenêtre de la cuisine, au quatrième étage, possède un balcon qui donne sur un jardin avec une petite maison habitée par des Banglas.

Soudain, j'entends des pleurs, des cris et des lamentations ; de quoi réveiller toute une bande d'aveugles dormant dans le brouillard avec des lunettes de soleil.
Je me penche sur le jardin, c'est l'effervescence. Une femme pleure comme si elle avait vu le diable, un groupe d'homme s'excite autour d'un autre auquel ils commencent à mettre des claques. Habitué aux appels nocturnes des muezzins, mais ignorant du rituel des gifles, je cours chercher mes lunettes. Après avoir rassuré Alice, courant épouvantée à ma rencontre, je remarque qu'une autre bande de types, avec des blousons marqués "RAB" dans le dos ramassent des bâtons pour les casser sur les jambes du pauvre bougre.

Un tas d'objets semblant giser ad probationem non loin du lieu du drame me font abandonner la thèse du viol incestueux pour celle du cambriolage.

Les types de la "RAB" finissent par embarquer le malandrin dans un van pendant qu'une bande d'excités continue de gesticuler.

Quel pays ! Je retourne me coucher !

J'apprend le lendemain que la RAB est la force d'intervention spéciale du pays. Charmant.

Maxal Bangladesh ltd